FABRICATION

Fabrication

 

Cette page est consacrée à la fabrication du film. Elle met en lumière les métiers du cinéma en laissant la parole à celles et ceux qui y ont participé. Vous avez à disposition des documents de travail, note d’intention, scénario ainsi que les propos de la co-scénariste du film, centrés sur le travail d’adaptation et d’écriture. Comment passe-t-on des sources, au scénario, à la mise en images.

Vous pouvez également découvrir comment on aborde les lieux de tournage et les décors d’un film à travers les différentes étapes de travail, celles du bureau d’accueil des tournages, du repéreur et du chef décorateur. Sont enfin abordés le travail sur l’image et le casting.

 

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L’ÉCRITURE

  • L’histoire s’étend sur douze années, ce qui représente un défi en termes de récit et suppose de faire des choix. Comment avez-vous procédé avec votre coscénariste ?

    Dans un premier temps, c’est un long travail d’élagage, qui ressemble à celui que j’avais fait sur Roberto Succo. Au lieu de construire classiquement le récit et de le faire monter en mayonnaise, ici c’est l’inverse : on travaille la matière réelle comme un sculpteur la terre, en en retirant le surplus pour peu à peu lui donner forme… Puis ça a été beaucoup de discussions et de contradictions avec Nathalie Najem, la scénariste, qui m’a poussé dans mes retranchements. Toujours à cause de cette même question. Quel est le point de vue ? Qu’est-ce qu’on raconte à travers cette histoire ? Le fait divers pouvait faire l’objet de plusieurs films très différents. Il ne doit être qu’un point de départ, une matière, la réalité doit absolument devenir fiction. Dans les premières versions, il y avait plus d’allers-retours sur la mère, et peu à peu ça s’est radicalisé sur le point de vue des garçons, l’omniprésence du père d’un côté et l’absence de leur mère de l’autre. Et puis il fallait trouver une ellipse, la bonne, pas question de relater les onze années de cavale, ça aurait été beaucoup trop fastidieux. Pas question non plus d’alourdir le récit avec une somme de détails sur les batailles judiciaires ou les poursuites policières, mais au contraire raconter la cavale et le système de survie avec le moins d’éléments possibles. On s’est concentré sur deux périodes : les deux premières années avec les enfants petits (entre sept et dix ans), au moment où leur père est leur héros, leur guide, ils acceptent tout, l’idéologie et les conditions de vie qui vont avec, c’est le temps du bonheur et de l’osmose ; et la dernière année, quand les fils approchent la majorité et que tout bascule. À ce moment-là, la clandestinité, le mensonge, la vie avec les bêtes, tout leur devient insupportable. C’est le deuxième acte, le temps de la rébellion. Le film s’est également beaucoup réécrit et façonné au montage avec Simon Jacquet. J’ai même repris le scénario entre les deux périodes de tournage (été, hiver) après que le montage ait commencé.

    Entretien avec Cédric Kahn

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DOCUMENTS DE TRAVAIL

Une note d’intention est un court écrit dans laquelle le réalisateur explique pourquoi il a envie de faire ce film et comment il va essayer de le rendre visuellement.

Un scénario est une transcription écrite d’un film, c’est-à-dire une succession d’images et de sons qui vont construire une histoire destinée à être filmée. Le scénario expose donc, de la manière la plus précise possible, ce que le spectateur entendra et verra sur un écran de cinéma ou de télévision. Les scènes décrites dans un scénario évoluent au tournage puis au montage.

 

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ENTRETIEN AVEC LA CO-SCÉNARISTE

Le.la scénariste est un.e professionnel.le de l’écriture. Son rôle est de mettre en situation un texte, de déterminer un contexte, des décors, des actions et des gestes, bien avant les dialogues.

Nous avons rencontré Nathalie Najem, co-scénariste avec Cédric Kahn du film Vie sauvage, elle nous parle de son métier et de son travail sur le film.

Écouter Nathalie Najem

 

La bande audio et la vidéo ont été montées par Stéphan Balay.

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LA SCÈNE DU COMMISSARIAT

Nathalie Najem revient ensuite sur la scène du commissariat et nous explique son approche en partant des sources dont Cédric Kahn et elle disposaient. Elle évoque l’écriture du scénario et la réalisation du film.

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LES DÉCORS

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ACCUEIL DES TOURNAGES

Le film Vie sauvage est inspiré d’une histoire vraie qui s’est déroulée essentiellement dans les Cévennes – Lozère et Gard. Cédric Kahn était très attaché au fait d’incarner son récit dans les lieux d’origine.

Cependant son scénario, qui racontait une histoire sur près de dix ans, ne se déroulait pas uniquement en région Occitanie mais également dans des endroits plus éloignés en France comme dans le Luberon, sur la côte d’Azur, en Corse et en Normandie.

Afin d’éviter trop de déplacements coûteux et d’optimiser la logistique de l’équipe technique au moment du tournage, la commission du film, qui accompagne les réalisateurs et les réalisatrices dans leurs recherches de décors, a proposé à la production de recentrer tous les lieux du film dans une seule région.
Après de longues recherches, en compagnie du réalisateur et de Matthieu Laemlé, le repéreur du film, des lieux similaires à ceux recherchés et vraisemblables, de par leur architecture ou leur paysage, ont été trouvés en région.

Propos de Marin Rosenstiehl
Responsable de l’accueil des tournages
Languedoc-Roussillon cinéma

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LES LIEUX DE TOURNAGE

Ainsi, le Luberon s’est tourné dans des paysages du Gard, l’Ariège dans les montagnes cévenols, la Corse dans des paysages méditerranéens des Pyrénées-Orientales, la campagne normande au nord de Carcassonne.

À noter que pour la séquence de la gare et du train en Normandie, la production a fait faire acheminer par la SNCF, un train avec le logo de la Région Normandie dans la gare de Bram dans l’Aude (Occitanie) afin de créer l’illusion d’une gare normande.

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ENTRETIEN AVEC LE CHEF DÉCORATEUR

Le travail du.de la chef.fe décorateur.rice commence au début de la préparation du tournage. Après la lecture du scénario, il.elle propose au.à la réalisateur.rice plusieurs concepts de décors. Il.elle tient compte des indications artistiques ainsi que des impératifs techniques et budgétaires.
Il.elle est en capacité de créer un décor qui sera implanté dans un espace de tournage vide (studio), ou qui viendra s’ajouter à un décor naturel existant, intérieur ou extérieur.

Nous avons rencontré Guillaume Deviercy, chef décorateur pour le film Vie sauvage, il nous raconte son métier, son expérience auprès de Cédric Kahn et plus particulièrement son travail pour la scène d’ouverture.

 

 

Le réalisateur Alexandre Liebert a mis en images cette rencontre, dans un nouveau numéro de la série Entre les plans, initiée par Languedoc-Roussillon Cinéma et qui  interroge les partis pris esthétiques et techniques de la création cinématographique.

  • Le film démarre avec la scène de rupture, le spectateur est plongé dans le film de façon abrupte…

    Personnellement, j’adore quand les films démarrent sans préambule et que je dois rattraper les infos au fur et à mesure du récit. Si on avait raconté l’histoire des parents, on aurait probablement commencé par la rencontre, la genèse, le contrat d’amour, qu’on montre dans le flash-back. Mais comme c’est l’histoire des enfants, on a choisi de commencer par le moment où la famille se déchire. Jusque-là les garçons vivent dans une sorte de paradis familial. Mais tout va basculer. Leur mère qui ne supporte plus cette vie de sacrifice et de dénuement, quitte brusquement le navire. C’est un premier choc pour les garçons qu’on arrache à leur vie de toujours et ce choc va être le générateur de tous les autres. C’est cette violence qui va continuer à se répercuter pendant toutes ces années, une violence appelant une autre violence, jusqu’au dénouement final…

    Entretien avec Cédric Kahn

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L’IMAGE

  • Tourner dans la nature, cela représente-t-il des contraintes particulières ?

    Non au contraire, c’est un immense sentiment de liberté, car on ne ressent pas la pesanteur des décors, et on peut tourner à 360° en permanence. On est parti sans projecteur et au bout d’une semaine, on a viré toute la machinerie. Il ne restait plus que les caméras. Deux en permanence, ce qui permettait que ça joue tout le temps, que les enfants soient acteurs ou en réaction. Avec Yves Cape, l’opérateur du film, on s’est adapté à la lumière naturelle. On a attendu le soleil, on s’est placé par rapport à lui, y compris dans les intérieurs. C’est la première fois que je tourne de cette manière et j’ai adoré cette simplicité, cette souplesse. Pour moi ça s’imposait au sujet. Ça me semblait impossible de raconter cette histoire avec les artifices habituels du cinéma.

    Entretien avec Cédric Kahn

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ENTRETIEN AVEC LE CHEF OPÉRATEUR

Le.la chef.fe opérateur.rice est le.la responsable technique des prises de vues et de la qualité artistique de l’image, il.elle travaille en étroite collaboration avec le.la réalisateur.rice. Avant le tournage d’une scène ou d’un plan il.elle règle l’éclairage des décors, le cadrage et la composition des images en fonction du découpage technique. Pour recréer les ambiances et les couleurs, il.elle utilise la lumière naturelle ou artificielle.

Dans un entretien extrait du DVD du film, le chef opérateur Yves Cape explique l’intérêt de travailler avec deux caméras.

 

 

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LE CASTING

  • On imagine que le casting des enfants est une étape cruciale pour un tel film.

    Primordial. On a mis en place avec la directrice de production (Aude Cathelin) et le casting (Antoine Carrard) un dispositif de recherche en province. On voulait des enfants assez proches de ce mode de vie-là. On a envoyé des gens parcourir les communautés, on recevait aussi pas mal d’essais vidéo par internet. Après une première sélection, on a fait venir à Paris les gamins qui nous intéressaient. Il a fallu plus de six mois de casting pour trouver les quatre enfants du film. Entre les contraintes de jeu et de ressemblance, c’était très compliqué. À l’arrivée, ils sont ma grande fierté. Je les trouve tous les quatre magnifiques. Et ce qui est très émouvant, c’est la ressemblance entre les petits et les grands, pas seulement physique, de tempérament aussi, on a le sentiment de ne pas les quitter, c’est très troublant.

    Entretien avec Cédric Kahn

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ENTRETIEN AVEC LE DIRECTEUR DE CASTING

Le.la directeur.trice de casting se fait tout d’abord une idée précise du projet à venir en lisant attentivement le scénario et en se renseignant auprès du.de la réalisateur.trice sur son univers. Il.Elle fera ensuite des premières propositions sur l’ensemble de la distribution ou sur une partie uniquement (rôles secondaires, figuration…) dans le cas où le.la réalisateur.trice a déjà des idées très précises sur les rôles principaux. Une fois une première sélection faite, le.la directeur.trice de casting organise les séances d’essais filmés.

Dans un entretien extrait du DVD du film, le directeur de casting Antoine Carrard raconte l’histoire du casting de Vie sauvage et livre des extraits des essais réalisés avec les jeunes enfants du film.

 

 

  • Avez-vous rapidement pensé à Mathieu Kassovitz pour jouer le rôle du père ?

    Je pense depuis très longtemps qu’il est l’un des meilleurs acteurs français. J’ai pensé à lui très tôt mais sans lui proposer parce que j’étais convaincu qu’il n’accepterait pas. On a brassé pas mal d’idées et on est revenu vers lui, assez tard, environ deux mois avant le début du tournage. Il a tout de suite accepté. Après l’avoir rencontré, j’ai été convaincu qu’il pourrait s’identifier à Fortin. Je le sentais attaché aux convictions du personnage, à sa radicalité, à son côté antisystème. C’est d’ailleurs ce qui est troublant à la vision du film : il semble très habité, on a presque le sentiment qu’il ne joue pas.

    Entretien avec Cédric Kahn

  • La prestation de Céline Sallette est d’autant plus remarquable que la mère apparaît dans peu de scènes, et que celles-ci se passent à onze ans d’intervalle !

    Sa partition est de loin la plus difficile, très peu de scènes et que des scènes climax. Et elle s’en sort remarquablement bien, faisant exister son personnage, ses souffrances, ses craintes, en quelques regards, quelques phrases. Quand elle réapparaît, après dix ans d’absence, elle est vraiment impressionnante, à nu, sans fard, sans force, presque crucifiée par ces années de quête, tout le « off » du récit peut se lire sur son visage.

    Entretien avec Cédric Kahn